Le lait de la terre

Le lait de la terre

Tu avançais.
C’était un matin, à l’heure où le soleil n’existe que parce qu’on y croit.
La terre déployait devant toi ses écharpes de brumes. C’était un spectacle de rêve. La rosée s’effilochait en lambeaux impalpables et disposait ses perles comme autant de trésors sur chaque brin d’herbe. Au loin l’aube rosissait, comme troublée devant tant de beauté.

Toi tu marchais sans hâte, et l’air frais s’invitait à pleine gorge dans tes poumons Tu aurais voulu le boire à pleines gorgées. Tu respirais la vie qui naît sans bruit. Le parfum des aubes triomphantes d’après la nuit. Quand le jour se décline à l’infini en mille camaïeux de gris et que les ombres s’effacent devant la lumière naissante. Le voile blanc vaporeux semblait se dissoudre dans l’air sous tes pas. L’or du ciel se diluait peu à peu. L’aube avançait. La pointe fine des herbes gelées découpait lentement le coton de la nuit et tu reconnaissais les arbres d’ombres éphémères. C’était l’heure d’avant. L’heure où tout devient clair. 

Tu avançais.
Tes pas suivaient l’empreinte des jours anciens réinventés et leur sillon impalpable se réchauffait aux rayons neufs d’un soleil nouveau-né.
C’était un matin, peut-être le premier. 
Et soudain la lumière but le lait de la terre.

© MLS 03/12/2015
Photo prise en Corrèze le 12/11/2015