Je me souviens # 3
Quand arrive l'automne et son air de nostalgie, l'odeur de rentrée des classes, les jours qui raccourcissent... je ne peux m'empêcher de repartir sur le chemin de mes souvenirs...
Alors, comme là et là, je me souviens...
ma classe de CP à l'école de Souilhac, à Tulle, en 1965 - Classe de Madame VALADE
Je me souviens que la veille de la rentrée des classes, j'avais mal au ventre et que je ne pouvais pas m'endormir le soir...
Je me souviens qu'on réglait le réveil "Mickey" pour qu'il sonne à l'heure prévue et que ça changeait du rythme des vacances et des grasses matinées, même si nos parents avaient commencé à nous faire coucher plus tôt quelques jours auparavant
Je me souviens qu'on avait disposé au pied du lit le cartable déjà rempli d'une trousse et des quelques outils indispensables : règles, gomme, taille-crayon...
Je me souviens que la veille nous avions, mes soeurs et moi, préparé soigneusement sur le dossier de la chaise de la chambre les habits du lendemain
Je me souviens qu'on avait fait des achats exprès avec maman
Je me souviens qu'à cette époque-là, tous les écoliers portaient des blouses et que nous en avions toujours une neuve ce jour-là
Je me souviens qu'on l'avait choisie avec soin, parmi des modèles à carreaux, écossais, bleus ou rouges imprimés à pois, avec de grands cols blancs, des poches, et quelquefois une ceinture : elle ne devait pas ressembler à celle de l'année précédente
Je me souviens que maman nous mettait toujours dans la poche un mouchoir bien repassé et plié avec soin, et parfumé avec quelques gouttes de son parfum
Je me souviens qu'on portait aussi des chaussures neuves, abandonnant les sandales d'été pour des mocassins en cuir marron ou des chaussures vernies à brides, comble du luxe pour nous...
Je me souviens que papa mettait un soin tout particulier à les cirer chaque soir
Je me souviens de l'odeur du cirage, des chiffons posés sur le papier journal étalé dans la cuisine
Je me souviens que le petit-déjeuner avec des biscottes beurrées était prêt sur la table mais qu'on n'avait pas très faim
Je me souviens qu'il fallait se dépêcher pour ne pas être en retard et que cela me coupait l'appétit
Je me souviens que le premier jour papa nous accompagnait et nous déposait dans la cour de l'école
Je me souviens qu'il faisait gris et froid, car on n'était plus habituées à se lever au petit matin
Je me souviens que je cherchais du regard des têtes connues et que j'avais une grosse boule dans la gorge
Je me souviens de l'appel fait par la directrice
Je me souviens des maîtresses égrénant nos noms et de ma crainte de ne pas être dans la "bonne" classe, celle de mes copines ou de la maîtresse espérée
Je me souviens qu'il n'y avait que des filles car l'école à cette époque-là n'était pas mixte
Je me souviens que mon école ressemblait à toutes les écoles de la République
Je me souviens qu'il y avait une cour fermée par un muret surmonté d'une grille et un grand portail
Je me souviens qu'au centre trônait un gros marronnier, qu'il y avait un un préau pour les jours de pluie et des toilettes au fond de la cour
Je me souviens que j'avais toujours peur de demander à aller aux toilettes
Je me souviens qu'il fallait "prendre nos précautions", formule cent fois répétée par nos parents et la maîtresse
Je me souviens que je n'aimais pas fermer à clef la porte des toilettes et que je demandais toujours à une copine de m'accompagner et de "tenir la porte"
Je me souviens que les jours suivants on allait seules à l'école pourtant distante de plus d'un kilomètre
Je me souviens qu'on longeait la route sans descendre du trottoir, lorsqu'il y en avait un
Je me souviens qu'on rencontrait toujours les mêmes camarades, qui faisaient elles aussi le même trajet chaque matin et chaque soir
Mes deux soeurs et moi - 1967
Je me souviens qu'on longeait un talus fleuri et quelques jardins dont les fleurs débordaient du grillage, et que l'on cueillait au fil des saisons de jolis bouquets pour la maîtresse, giroflées, coucous jaunes ou bleus, fleurs blanches de la Vierge Marie...
Je me souviens que le jour de la rentrée, maman avait pris soin de préparer pour mes deux soeurs et moi trois beaux bouquets de même grandeur, cueillis la veille dans le jardin de mes grands-parents et formés des plus beaux dalhias
Je me souviens que la maîtresse les disposait dans un vase qu'elle posait sur son bureau et que j'étais fière
Je me souviens des porte-manteaux en fer alignés à notre hauteur dans le couloir
Je me souviens que le premier jour, la maîtresse nous distribuait des cahiers, certains recouverts de papier rouge et d'autre de bleu
Je me souviens que certaines années il y en avait un jaune et que c'était celui des dictées
Je me souviens que j'ai appris à écrire avec un porte-plume
Je me souviens des encriers de porcelaine remplis d'encre violette, qu'il fallait remplir sans déborder
Je me souviens des frises colorées et géométriques qu'il fallait dessiner pour terminer la page du cahier d'écriture
Je me souviens des leçons de choses
Je me souviens qu'il fallait apporter une pomme ou des feuilles mortes pour les observer
Je me souviens que j'avais une ardoise et une craie, et une petite éponge que je rangeais dans une boîte ronde qui contenait un peu d'eau mais pas trop, pour que l'éponge reste mouillée
Je me souviens que pendant la récréation, l'une de nous était désignée pour effacer les tableaux avec la brosse que l'on allait ensuite taper à l'extérieur contre le mur de la classe pour faire tomber la poussière de craie
Je me souviens que les murs de la classe étaient décorés d'affiches colorés qui racontaient des scènes de la vie quotidienne
Je me souviens que ces images étaient le prétexte à des leçons "d'expression orale"
Je me souviens d'un tableau qui représentait des enfants au piano et dont j'ai appris bien plus tard que c'était une reproduction de Renoir
Je me souviens de mon premier livre de lecture qui s'appelait "Colette et Rémi" et je me souviens d'une page avec une histoire de radis disposés sur une assiette comme une petite famille, du plus petit au plus gros
Je me souviens que la maîtresse avait dans le tiroir de son bureau un coffret en métal qui contenait des bons points roses et des images, qu'elle distribuait pour nous féliciter et nous récompenser
Je me souviens qu'il fallait 10 bons-points pour avoir une image
Je me souviens que je les rangeais dans une petite boîte
Je me souviens que la première de la classe obtenait le Prix d'Excellence et que la Directrice lui remettait de beaux livres à la fin de l'année
Je me souviens que j'ai eu souvent ce prix, mais une fois le Prix d'Honneur parce que ma meilleure copine m'avait dépassée
Je me souviens de la cantine avec ses tablées de 10 et des grosses louches de purée que la dame de service nous mettait d'office dans l'assiette
Je me souviens qu'il fallait tout finir et que j'avais horreur des saucisses trop grasses qui me donnaient envie de vomir
Je me souviens du broc d'eau et des gros verres ronds en pyrex
Je me souviens de la cloche qui marquait les récréations
Je me souviens que je restais à l'étude le soir parce que mes parents travaillaient
Je me souviens de la récréation qui la précédait et qui nous donnait l'occasion de parties de Gendarmes et voleurs au cours desquelles nous escaladions les escaliers qui menaient à l'étage et qui nous étaient habituellement interdits
Je me souviens de la dame qui venait nous donner des leçons de chant et de musique et qui avait un instrument étrange appelé guide-chant
Je me souviens que certains élèves achetaient des bonbons à l'épicerie qui jouxtait l'école
Je me souviens surtout du goût des coquillages remplis de sucre coloré que l'on léchait pendant des heures et que l'on se prêtait même parfois
Je me souviens...
Et mes souvenirs ont le goût de l'enfance, le goût des choses du passé et des bonbons anciens qui persiste longtemps après qu'il n'en reste plus rien
Je me souviens...
Et vous, c'était comment ?....
Ma soeur Annette et moi - 1965
A suivre là !
Je vous propose dans les jours à venir de m'envoyer une photo de classe, (la votre ou celle de vos enfants), accompagnée d'une ou deux anecdotes sur l'école...
Après les Histoires de doudous, les Histoires de mariages, de rues et de tiroirs, que j'ai déjà racontées sur mon blog, on pourrait ensemble réécrire la semaine prochaine des "Histoires d'école"...
Seriez-vous partantes ? Si oui, dites-le moi et faites-le savoir à d'autres bloggeuses, afin que vous soyez nombreuses à participer... Merci d'avance !